rue du Transsibérien
Transsibérien (rue du)
Transsibérien (rue du) [en projet, C7-C8]
Conseil communal (/).
Toponyme créé (toponyme indirectement descriptif).
* Thème du chemin de fer.
* Thème des grands scientifiques, inventeurs et industriels.
Dans le contexte de l’aménagement de la zone de la future gare RER de Louvain-la-Neuve, la Commission de toponymie a proposé de dédier ce nouveau quartier au thème du chemin de fer. Dans ce contexte, elle avait suggéré de nommer une voie piétonnière « rue du Transsibérien », créé sur le modèle de l’Orient-Express. Il s’agissait d’évoquer indirectement la figure de l’homme d’affaires liégeois Georges Nagelmackers (1845-1905), fondateur de la Compagnie internationale des wagons-lits, laquelle créa l’Orient-Express et le Transsibérien [PV OL, 10-11].
* À côté l’Orient-Express, ce train légendaire immortalisé par Agatha Christie (Le Crime de l’Orient-Express) et Guillaume Appolinaire (Les Onze Mille Verges), le Transsibérien fut l’autre fleuron réputé de la Compagnie internationale des wagons-lits, fondée en 1876 par le Liégeois Georges Nagelmackers.
Si la première réalisation de la Compagnie fut l’Express d’Orient (1887), bientôt rebaptisé l’Orient-Express (1891) et qui reliait Paris à Constantinople, la Compagnie lança ensuite le Sud-Express (1887), entre Paris à la péninsule ibérique (Madrid et Lisbonne), le Nord-Express (1896), entre Paris et Saint-Pétersbourg (via Ostende), et le Transsibérien (1898), entre Moscou et Vladivostok. En fait, l’initiative de la construction d’une ligne de chemin de fer transsibérienne revient au gouvernement russe, qui s’inspira ici du train transcontinental canadien. Il s’agissait de mettre en valeur l’immense domaine sibérien, d’appuyer la flotte russe du pacifique et de développer l’influence russe en Chine. Une première section Samara-Oufa fut mise en service en 1888, mais il fallut attendre 1891 pour que le prolongement jusqu’à Vladivostok fût décidé. C’est dans ce contexte que la Compagnie internationale des wagons-lits joua un rôle de premier plan dans le financement de la ligne (elle ne sera achevée qu’en 1906), puis dans son exploitation. Si la Compagnie n’est plus active aujourd’hui dans le transport, la ligne existe toujours : le Baïkal, par exemple, permet de relier l’Oural à Irkoutsk, et de là à Vladivostok. Certaines sociétés de voyage offrent d’ailleurs aux nostalgiques des possibilités de croisières ferroviaires de quinze jours qui n’ont rien à envier à celles de la Belle Époque…
Georges Nagelmackers (1845-1905) appartient à une illustre famille d’industriels et de banquiers liégeois, dont on trouve déjà des traces au Moyen-Âge : au XIIIe siècle les Nagelmackers exercent le métier de cloutiers dans le Brabant néerlandais (d’où le nom, qui signifie littéralement ‘faiseur de clous’). Plus tard, on les retrouve dans la meunerie et c’est un certain Peter, fils d’un meunier du nord du Limbourg, précisément, qui fondera à Liège, en 1747, la première banque Nagelmackers, qui a longtemps fait partie du paysage financier liégeois : ce n’est qu’en 2001 que la banque « Nagelmackers 1747 » a fusionné avec la « Delta Lloyd Bank (Belgique) », alors qu’elles étaient toutes deux filiales du groupe hollandais Delta Lloyd.
Fils d’Edmond Nagelmackers et d’Eugénie-Jeanne Orban, Georges grandit dans une famille active notamment dans la houille (notamment aux charbonnages liégeois Kessales et Bonnefin) et dans la métallurgie (particulièrement dans la S.A. de Grivegnée et dans la Vieille-Montagne). Il obtient son diplôme d’ingénieur civil des arts et manufactures en 1867 à l’Université de Liège, dont les Écoles spéciales étaient alors réputées dans le monde entier. Après ses études, il ne se lance pas immédiatement dans la vie active et séjourne notamment aux États-Unis. À partir de 1872, il est très actif dans le secteur des fours à coke liégeois, mais il a d’autres ambitions. De son séjour sur le Nouveau Continent, il a retenu l’idée des wagons-lits de la célèbre Compagnie Pullman et réfléchit à un équivalent européen. Ce sont les tentatives d’implantation sur le continent de cette dernière qui le décide à agir : alors que Pullman est déjà actif en Angleterre et s’installe en Italie, il se lance dans l’aventure. Alors qu’il n’a que vingt-sept ans, il est fermement soutenu par les membres de sa famille et leurs amis (son cousin, O. Neef-Orban ; son oncle et son frère, Ernest et Jules Nagelmackers ; etc.), avant que l’entreprise ne s’internationalise de plus en plus (vers 1900, à côtés des Belges Charles Delloye-Mathieu et du baron del Marmol, on y trouve tous les grands noms de la finance internationale). Lui-même, s’il reste actif en région liégeoise, est très présent sur la scène internationale, comme administrateur de diverses sociétés sidérurgiques et d’exploitation des chemins de fer en Belgique, au Grand-Duché de Luxembourg, en France, en Allemagne et dans l’Empire Ottoman.
Par la suite, la Compagnie internationale des wagons-lits connaîtra bien des évolutions conditionnées notamment par l’évolution des modes de déplacement et… les avatars politiques de l’Europe. Elle existe cependant toujours, mais davantage comme société de services ferroviaires que comme acteur du trafic international.
Bibliographie : BN, t. XXXVIII, col. 623-626 ; B. Commault, Georges Nagelmackers, un pionnier du confort sur rail, Uzès, [1966] ; J.-P. Caracalla, Le goût du voyage. De l’Orient-Express au train à grande vitesse. Histoire de la Compagnie des wagons-lits, Paris, 2001 ; Id., Les fabuleuses histoires des trains mythiques, Monaco, 2007 ; J. Des Cars et J.-P. Caracalla, Le Transsibeérien. L’Extrême Orient-Express, Paris, 1986 ; C. Mossé, Le transsibérien. Un train dans l’histoire, Paris, 2001 ; G. Verbeurgt, Le temps du train. 175 ans de chemins de fer en Belgique, Leuven, 2001.
L. Courtois.
→ Courbe Voie ; Transsibérien.